Spectacles 4 de Snapchat, un avant goût de la réalité augmentée

Une rupture technologique et stratégique dans la gamme des Spectacles

Snap Inc., l’entreprise californienne propriétaire des applications Snapchat, Zenly et Bitmoji, investit massivement dans les lunettes connectées depuis 2016 à travers leur gamme Spectacles. Tandis que leur premier et second modèle étaient équipés d’une caméra capable de capturer des photos et de courtes vidéos exportables dans leur application Snapchat, les Spectacles 3 intégrait une seconde caméra capable de créer des vidéos en 3 dimensions cette fois-ci utilisables via n’importe quel réseau social. La firme d’Evan Spiegel persévère dans la voie des lunettes connectées avec une quatrième mouture qui constitue un bon technologique.

A l’inverse des paires proposées précédemment, les Spectacles 4 ne sont pas disponibles pour le grand public. Deux raisons principales peuvent expliquer ce choix. La première est justifiée par l’échec commercial rencontré par les anciennes moutures qui ont laissé derrière elles des centaines de milliers d’invendus. Snap Inc. a donc produit leurs nouvelles lunettes en quantité limitée. La seconde raison est la volonté de l’entreprise de toucher avant tout les développeurs et les créateurs de contenu désirant tester les possibilités offertes par les nouvelles Spectacles. Pour les essayer, le site officiel met à disposition un formulaire de demande.

La firme conçoit ces lunettes comme la future interface de Snapchat, leur réseau social riche de 500 millions d’utilisateurs actifs. Cette interface est appelée à devenir l’élément au cœur de leur réseau en faisant le lien entre le monde réel et les multiples contenus virtuels proposés par la firme californienne dans le futur. En sortant de véritables lunettes de réalité augmentée dès à présent, Snap Inc. devance donc ses principaux concurrents comme Apple ou les Ray-Ban Stories Meta.

Des lunettes connectées à l’ère de la réalité augmentée.

Si elles reprennent l’allure de lunettes de soleil connectées que proposait déjà les anciennes Spectacles, cette quatrième version marque un tournant technologique par rapport à ses prédécesseuses : elles sont les premières à être équipées d’écrans intégrés aux verres capables de projeter des images en 3D. Si cette technologie existe déjà dans certains casques de réalité virtuelle comme les HoloLens de Microsoft ou les Meta Quest (anciennement appelé Occulus), les Spectacles 4 sont les premières lunettes à en bénéficier.

D’aspect anguleux, la monture est massive et ne dénoterait pas avec le design du Cybertruck présenté par Tesla. Pesant 134 grammes, les lunettes s’avèrent 5 à 6 fois plus lourdes qu’une paire traditionnelle. Elles sont donc difficilement portables toute la journée. L’objectif de la firme ne semble de toute façon pas de proposer une monture discrète et légère mais plutôt un modèle audacieux et expérimental embarquant des technologies encore inédites dans des lunettes.

Dotées de deux caméras, de quatre microphones, d’un pavé tactile et de haut-parleurs stéréo, les Spectacles disposent d’une faible autonomie de 30 minutes. L’étui autorise quatre recharges complètes. Les lunettes intègrent également dans chaque verre un écran 3D à guide d’ondes. C’est lui qui permet de voir et d’interagir avec des objets en réalité augmentée de façon immersive. Ces deux affichages à faible latence (environ 15 millisecondes) ont un champ de vision diagonal de 26,3 degrés qui superposent les objets en 3D dans la vision du porteur. Disposant d’un réglage dynamique de la luminosité allant jusqu’à 2000 nits, les lunettes sont facilement utilisables à l’extérieur même dans des conditions très lumineuses.

Les Spectacles sont équipées d’un processeur Qualcomm Snapdragon XR1 doté d’un cœur dédié à l’intelligence artificielle conçu pour les dispositifs de réalité augmentée ou virtuelle. Capable de capter les mouvements, ce processeur permet aux lunettes un suivi des mains, des surfaces et autres marqueurs pour placer ou rectifier le placement des objets 3D visualisés par le porteur. Côté audio, il intègre la fonction HTRF (Head-Related Transfer Function) qui spatialise le son de manière à ce que l’utilisateur ait l’impression d’entendre des sons venant d’endroit précis dans l’espace.

Des lunettes pensées pour l’écosystème Snapchat

Suite à l’échec des premières Spectacles sorties en 2016, Evan Spiegel, le CEO de Snap Inc., déclarait avoir conscience que l’adoption par le grand public des lunettes intelligentes nécessiterait sans doute une dizaine d’années et que cette adoption passera par la création d’une communauté forte qui reposera sur « un écosystème florissant d’expériences dont les utilisateurs pourront tirer profit ». Dans cette logique, s’adresser tout d’abord aux développeurs et aux créateurs de contenu en réalité augmentée fait sens.

La firme d’Evan Spiegel indique d’ailleurs que les Spectacles 4 ont été conçues pour permettre à ces derniers de « découvrir de nouvelles façon de fusionner créativité et utilité grâce à des expériences immersives » par le biais de Lens Studio, l’outil de création des fameux filtres Snapchat. Cet outil gratuit, déjà adopté par plus de 200 000 créateurs, ne cesse de s’étoffer. Il intègre désormais un éditeur d’effets visuels pour améliorer le rendu en réalité augmentée ou encore du 3D Body Mesh qui permet de créer des objets virtuels (vêtements, accessoires, visuels…) qui s’adaptent parfaitement à un corps physique en mouvement.

Ainsi, les Spectacles 4 sont pleinement intégrées à Lens Studio et permettent aux professionnels de créer des contenus en réalité augmentée et de les tester directement grandeur nature. De nombreux créateurs et quelques marques expérimentent déjà ces lunettes afin de proposer des filtres mais aussi des expériences en réalité augmentée permettant au porteur d’avoir des informations, des jeux ou encore des créations visuelles virtuelles directement à portée d’œil.

Écrit par Thomas Bernard